Une nouvelle phase de la transformation

Oromë errait, non loin de la forteresse qui l'accueillait. C'était une lande désolée, rocheuse, où la vie semblait avoir disparue. Une forêt d'arbres morts non loin offrit à l'Archange un peu de pitoresque à sa "randonnée".

Il pensait. Pensait à sa vie. Celle qui était passée. Celle qui était la sienne aujourd'hui. Kâli l'avait accueilli, avec l'assentiment de son Seigneur, Enexiel. Mais les autres démons étaient généralement... distants. Voire hostiles.
C'était loin de l'ambiance de l'Ordre des Moines Kaï. mais là bas, il n'était pas un étranger accueilli. Il avait été le maître. Le maître d'un mouvement qui vivait dans le mensonge du message divin, le poussant à une violence incroyable. La collecte des têtes de leurs ennemis abbatus en était le symbole le plus abouti. Trancher en l'honneur de Dieu ce qui fait l'identité d'un être. Lui offrir comme si cela pouvait changer quelque chose à sa foi et à son salut. Une abbération.

L'ange était assis désormais contre un arbre. Il somnolait. Pourtant, c'était un guerrier aguéri, il aurait du entendre les bruits de sabots. Pourtant avant que le destrier ne le pousse du museau, il n'avait pas senti sa présence. L'ange se retourna pour voir un magnifique destrier noir, un peu comme ces percherons que l'Ordre employait pour la guerre, de lourds destriers pouvant supporter le poids de l'armure. Autour de lui, une brume semblait toujours se déplacer.

Oromë se leva pour se rendre compte que le cheval était particulier. C'était une entité démoniaque, en soit. Une créature faite pour servir les créatures infernales. Sa robe était plus sombre qu'une grotte sous une montagne, ses naseaux laissaient parfois échappés de petites volutes de fumée. Mais l'originalité du cheval venait avant tout de ses sabots : d'immenses sabots où le poil était remplacé par des flammes. Oromë posa sa main sur le museau du cheval.

"Qui es-tu, mon ami. Et qui es ton propriétaire?"

Le cheval hennit alors un peu et frappa sans violence l'épaule gauche de l'ange avec son museau. Il continuait à régarder fixement l'ange déchu aux ailes aussi noires que sa robe l'était, la peau grise et les cheveux d'un blanc immaculé.

"Tu veux dire que je suis ton maître?"

La question semblait stupide en soit, demander cela à un cheval revenait à demander à un escargot la direction de Kimora. Pourtant le cheval hennit doucement de nouveau et posa sa tête sur l'épaule de l'ange, comme pour répondre par l'affirmative.
Oromë n'avait pas monté de destrier depuis des années, mais lorsqu'il était humain, il avait été un cavalier de qualité. Il savait comment agir envers le cheval. Il le caressa donc, lui flattant le cou, puis se déplaçant, il l'enfourcha rapidement, craignant que l'animal ne rue. Pourtant la bête resta placide, tournant la tête comme pour vérifier que son cavalier était bien en place, puis d'une simple pression des genoux de son maître, il s'élança. Les distances qu'il couvrait était celles d'un cheval normal, mais autour de lui avançait sans cesse une brume immense, dense à tel point qu'on ne pouvait voir à plus de deux pas. Cela gênait l'ange qui ne pouvait voir ce qu'il y avait devant lui. Alors la brume diminua, comme pour disparaître. Il comprit que c'était du cheval lui-même qu'émanait la brume. La brume. Non loin de la forteresse que dirigeait la soeur du défunt Seigneur des brumes, Esperân. Seigneur qu'Oromë avait tué. Il n'y a pas de hasard...

L'ange sourit puis mit son cheval au trot. Il rentra à la forteresse, et voulut laisser le cheval devant le vaisseau dont il occupait une cabine. Mais le cheval le suivit, montant à son tour sur le pont où il se coucha... Etrange créature.

oromë se dit qu'il voulait le monter portant son armure, le bouclier d'Esperân au poing, car cela donnerait une grande impression. Et il se doutait que ce serait réellement le cas.